Naviguer à vue
Les moments de découragement arrivent parfois sans prévenir et reviennent sans y avoir été invités. Méandre les apprivoise. Il sait qu’ils sont furtifs et qu’ils ne tariront pas le fleuve. Vivre au présent est une aptitude qu’il développe aujourd’hui, en parallèle de ses habitudes de projection à moyen terme. Il sait qu’il peut prendre les bons virages. S’éloigner du rivage de temps à autre est autorisé. Ces dernières semaines, Méandre a appris à respirer sous l’eau quand la surface des flots lui paraît trop hostile. La pratique de l’apnée lui apporte alors un réconfort qu’il n’espérait plus.
Les signes d’espérance
Il y a des jours où il entrevoit des signaux faibles et puissants à la fois. Un concentré d’optimisme poétique. Un oiseau au plumage bleu qui chante un air de printemps. Un éclat de rire d’enfant sonore venant d’une cour d’immeuble défraîchie. Quelques notes de musique douce qui s’échappent librement vers l’avenir. Comme autant de témoins du vivant. Ce sont souvent des lueurs furtives au cœur d’un univers de silence profond. Méandre aime notamment cultiver les charmes discrets du petit matin. Les interstices des volets engourdis laissent entrer la pâle lumière de l’aube.
Aller dans le sens du courant
Toutes les fois où les éléments naturels se déchaînent, Méandre glisse dans le sens des vagues et il prend plaisir à les laisser passer. Car, par-delà le bruit et les bourrasques, le calme revient inexorablement. Méandre s’économise. Il a entendu dire qu’on pouvait apprendre à lutter à petites doses. Comme on dose ses efforts. Il s’attelle donc au fait de ne pas chercher à réussir tout le temps. Méandre choisit ses guerres. Imperturbable, il se laisse porter par le courant et il accueille la paix après la tempête des sensations.
Garder un cap
Vague après vague, il tient la barre. Sa longue vue lui ouvre des fenêtres insolentes sur une longue vie. Méandre regarde un point fixe. En gardien de son phare intérieur, il observe le temps qui s’étire avec pesanteur. Il tangue à loisir. Les repères vacillent. Le cours du fleuve se rétrécit par endroits bien précis. Néanmoins, Méandre garde son point d’arrivée en ligne de mire.
Pratiquer l’ancrage
Depuis quelque temps déjà, il jette l’ancre avec une discipline martiale. Quand il sent que l’assèchement le guette, Méandre fredonne avec persévérance un air qui lui donne du courage. Il répète à l’envi le même enchevêtrement de notes familières. Ainsi, il enracine l’histoire de sa vie. Pour défier l’imminence des dangers extérieurs et imaginaires, il puise inlassablement dans ses racines émotionnelles. En bon jardinier, il les arrose et les nourrit. Ce faisant, Méandre laisse le cours du fleuve s’élargir. Il visualise enfin un futur lumineux, aux confins de notre vie concrète. Une vie tranquille.
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